Historique

L’affaire de la carrière de Pagny-sur-Moselle

Les origines

Au départ de l’ « Affaire », un projet intercommunal d’ouverture d’une route forestière sur la rive droite du Rupt-de-Mad : partant de Villecey-sur-Mad, longeant la vallée pour terminer au sommet de la côte entre Arnaville et Pagny-sur-Moselle , cette route permettra d’exploiter plus facilement les forêts communales. La chaussée supportera le passage de nombreux grumiers. Elle doit donc reposer sur une épaisse couche de cailloux. Pour fournir le matériau, l’idée est avancée d’utiliser une ancienne carrière située sur la commune de Pagny-sur-Moselle. Une délibération du conseil municipal de Pagny-sur-Moselle du 14 septembre 1999 arrête une révision partielle du Plan d’Occupation des Sols (POS) qui autorise la réouverture du site. Dans ce projet, l’exploitation n’est que temporaire et concerne une surface d’environ deux hectares.

2001 : le dossier de la route forestière suit son cours. Les premières entreprises sont contactées. Seule la société Matériaux S.A. répond à l’appel d’offre envoyé aux carriers de la région. Après visite de l’ancienne carrière, l’entrepreneur refuse le marché : la remise en exploitation du site n’est pas rentable, compte tenu de la trop faible quantité de matériau à extraire. Mais un projet plus ambitieux a germé… Au cours du second semestre, des carottages sont effectués. Ils confirment que le calcaire de la côte est de bonne qualité. Le site pourrait fournir pendant plusieurs dizaines d’années du granulat (calcaire concassé) utilisable pour la fabrication de béton. Le carrier prend contact avec certains propriétaires des terrains exploitables.

1er trimestre 2002 : Matériaux S.A. approche également les élus pagnotins pour leur soumettre son projet. Une ébauche de projet est déposée en mairie. Elle délimite l’emprise de la future carrière, ainsi que le tracé d’une route d’évacuation des granulats qui aboutira sur la route départementale entre Pagny-sur-Moselle et Arnaville. Les premiers chiffres sont annoncés : surface de 40 ha, exploitée pendant 30 à 40 ans sur une profondeur de 40 m ; matériau dynamité et concassé sur place ; évacuation par camions dont le trafic ira jusqu’à 100 allers et retours par jour. Deux visites de carrières en activité sont organisées. Ces carrières sont situées plus loin des maisons que celle prévue à Pagny-sur Moselle, et à l’abri des vents dominants. Les visites ont lieu un vendredi après-midi, par temps humide. Certains visiteurs poussent cependant la curiosité jusqu’à consulter des habitants du voisinage. Ils constatent que les nuisances ne sont pas aussi négligeables qu’annoncées.

9 avril 2002 : la presse rapporte des propos du maire de Pagny-sur-Moselle à la suite de la seconde visite (Républicain Lorrain du 9/4/2002). Il est question de « peu de nuisances liées directement à l’exploitation » et de « retombées financières estimées à quelques 61 000 € par an », chiffre très précis qu’il ne nous a pas été possible de faire confirmer depuis. Par contre, il est également noté que le « trafic poids lourds engendré par ce type de structure est très important ». Il est fait état de « la perpective d’implantation d’une cimenterie à terme ». Le projet paraît déjà bien avancé puisque « une décision devra être prise dans les cinq mois à venir ».

avril-juin 2002 : quelques pagnotins s’émeuvent à l’idée de voir s’implanter une carrière au-dessus de leurs têtes et de supporter les nuisances qu’elle engendrera. Un groupe s’organise pour en savoir plus et susciter un débat public. Les informations sont cependant difficiles à obtenir et parfois contradictoires. Il apparaît par contre clairement que lorsque le projet sera déposé en préfecture, il faudra disposer de beaucoup d’arguments et aller très vite pour avoir une petite chance de le stopper. Nous comprenons également que beaucoup de pagnotins confondent ce projet avec celui, déjà bouclé, d’une carrière provisoire à Prény qui alimentera le chantier TGV. Les perturbations actuelles sont favorables au dépôt du dossier. Quelques nuisances de plus ou de moins…. Mais dans cinq ans, lorsque les travaux du TGV seront achevés, la carrière et ses camions seront encore là, pour longtemps.

24 juin 2002 : une réunion publique est organisée. Elle rassemble une cinquantaine de personnes, pour la plupart inquiètes et opposées au projet. M. D. Gloekler, adjoint au maire à Norroy-lès-Pont-à-Mousson, nous parle d’un dossier similaire déposé il y a 10 ans dans sa commune et qui a été repoussé par l’action d’un collectif. Depuis, nous avons eu connaissance d’autres affaires similaires (Vandières, Blénod-lès-Pont-à-Mousson, …). Les carriers sont en recherche permanente de nouveaux sites à exploiter et essaient régulièrement de placer des projets. L’intérêt de constituer une association apparaît clairement. C’est la meilleure façon d’avoir accès aux informations et de constituer un interlocuteur crédible lors de discussions futures. Certains élus locaux présents à la réunion se disent personnellement opposés au projet. Nous leur demandons de susciter une prise de position claire de tous les élus.

juillet-août 2002 : élaboration et dépôt des statuts de l’Association Pagnotine de Préservation de l’Environnement et de la Qualité de Vie, dite « Les Sonneurs de la Côte », dont l’objet est de veiller et participer au maintien, voire à l’amélioration, de la qualité de vie des habitants de Pagny-sur-Moselle et des communes voisines.

Le sonneur à ventre jaune est une espèce de crapaud protégée présente sur le Haut de la Côte. Il a les pupilles en forme de cœur et des taches jaune vif sur le ventre. Attaqué par un prédateur, il se retourne vivement sur le dos. Il prend alors l’apparence d’une salamandre, animal dont la peau corrosive fait fuir l’agresseur. C’est ce petit animal futé qui a donné son nom et son logo à l’association.


29 août 2002 : le conseil municipal de Pagny-sur-Moselle adopte à l’unanimité moins un [refus de vote] une motion contre la carrière dont le texte figure ci-dessous (Est Républicain du 30/08/2002) :

Le Conseil Municipal exprime de manière absolue et déterminée son opposition à l’ouverture d’une carrière à Pagny-sur-Moselle, parce qu’il refuse les nuisances inévitables suivantes :

La dégradation de l’aspect du site (un trou de 40 ha environ sur une profondeur de 40 m environ) Le bruit (tir de mines, broyage, concassage, criblage et transport de matériaux) Les poussières (provenant de l’exploitation même de la carrière et de la circulation des camions) Les vibrations et secousses dans une zone de glissement de terrains La circulation (200 camions par jour en traversée de Pagny et des villages voisins) Le cadre de vie (détruit par la carrière, en plus des travaux TGV)

Si malgré tout un dossier devait être présenté, un examen approfondi de celui-ci permettra au Conseil Municipal de relever point par point les atteintes que porterait la carrière à l’environnement et au bien être des populations pendant au moins 40 ans (durée d’exploitation prévue). Le Conseil Municipal sera vigilant et mènera les actions nécessaires : relation avec les associations, les autres communes, réunions publiques d’informations, requêtes auprès de la Préfecture et autres instances, actions en justice si nécessaire, …

septembre 2002 : assemblée constitutive de notre association et élection du conseil d’administration (le 13) ; élection du bureau (le 27).


Les actions

octobre 2002 – avril 2003 : les ‘Sonneurs’ s’activent sur plusieurs fronts :

  • avertir et sensibiliser la population des communes intéressées, en discutant, en intervenant dans les réunions publiques et en utilisant la presse et la radio,
  • rassembler les informations sur la procédure de dépôt d’un dossier d’ouverture de carrière et sur les risques et nuisances de ce type d’exploitation,
  • susciter un maximum d’adhésions : face à l’entrepreneur, aux élus et aux institutions, notre association n’aura de force que si elle représente un grand nombre d’adhérents (et d’électeurs). Nous comptons à l’heure actuelle plus de 120 adhérents, dont deux associations (Assoc. de Protection de l’Environnement de Vandières et Assoc. de Chasse Communale Agréée de Pagny-sur-Moselle),
  • amener nos élus à prendre position : M. Y. Biston, conseiller général, questionné à l’occasion d’une réunion publique, admet les nuisances de ces exploitations et se dit prêt à accompagner le maire de Pagny-sur-Moselle dans ses éventuelles démarches auprès de la préfecture. Lors d’une entrevue qu’il nous accorde, M. J.Y. Le Déaut, député, se dit sensible au problème des nuisances et demande par écrit au préfet de le tenir informé de l’évolution du dossier.
  • suivre l’évolution du projet en contactant les propriétaires et en téléphonant régulièrement à la préfecture. Une entrevue est demandée par écrit auprès du carrier. Faute de réponse, nous le contactons par téléphone. Il nous annonce que, compte tenu de l’opposition de la population et de la municipalité, il a renoncé à déposer son projet. Il remarque cependant que la pression pour l’ouverture de nouveaux sites d’extraction va devenir de plus en plus forte et qu’il faudra bien que les autorités concernées prennent un jour leurs responsabilités.

avril 2007 : selon des sources concordantes, le carrier a entamé une procédure d’achat de terrains se trouvant sur le tracé du projet de route d’accès reliant le front de côte à la route départementale D 952. Certains propriétaires de terrains concernés confirment la procédure d’achat.

février – mars 2008 : à la faveur de la campagne pour les élections municipales, les « Sonneurs » demandent aux deux candidats têtes de liste de prendre position par rapport au projet de carrière. Le candidat de la liste « Notre ville, votre avenir », lors de la réunion publique du 14 février 2008, confirme, au nom de sa liste, la position adoptée lors du vote de la motion, en date du 29 août 2002, contre le projet de carrière. Le candidat de la liste « Ensemble, agissons pour Pagny », lors de la réunion publique du 4 mars 2008, indique son opposition au projet de carrière sur le territoire de la commune de Pagny-sur-Moselle. Lors de ces mêmes réunions publiques, et dans le cadre de la préparation de l'enquête publique relative au Plan Local d 'Urbanisme (PLU), les "Sonneurs" demandent à chaque candidat que le Règlement du PLU indique d'une manière claire que les terrains communaux impactés par le projet de carrière n' aient pas vocation à être utilisés pour la réalisation de la carrière.


juin 2009 : le conseil municipal issu des élections municipales de mars 2008 adopte à l’unanimité une motion contre le projet de carrière et confirme ainsi la position municipale prise lors de la délibération du 29 août 2002.


année 2011 : intervention auprès du Parc Naturel Régional de Lorraine, dans le cadre des ateliers de révision de la charte du parc : le territoire du parc n’a pas vocation à être mité par des carrières dont les durées d’exploitation envisagées, pour certaines, dépassent le siècle.

février 2012 : en attente de la réunion publique relative au P.L.U., l’association reste vigilante, en particulier à l’égard de certaines entreprises de travaux publics, de stature européenne, qui pourraient manifester un intérêt plus que prononcé pour le site de l’ancienne carrière.


27 juin 2014 : le conseil municipal issu des élections du 30 mars 2014 adopte à l’unanimité une motion contre le projet de carrière.